déc 09 24

Le gouvernement des apparences vient de s’appliquer à moi aussi d’une façon qui est a la fois risible et  rageante. Il s’agit d’un député écolo qui tient des lignes sur un blog qu’il partage avec Karima Delli, une députée que j’estime, elle, beaucoup. Il s’agit de Pascal Canfin. Ce petit m’as-tu-vu ne s’est sans doute pas remis d’avoir voté une résolution favorable au nucléaire, et même peut être d’avoir voté l’amendement de son propre groupe reconnaissant le marché carbone, tandis que pour ma part je n’ai voté ni l’un ni l’autre. J’ai dit que je n’en voulais à personne de ses votes. Lui, m’en veut de n’être que moi et d’avoir été davantage lui que lui-même. Il ne s’explique pas sur ce sujet si bien qu’on ne saura rien de ce qu’il pense. Par contre l’euro député était là, dans l’hémicycle à l’heure d’une des nombreuses et si émouvantes manifestations qui émaillent la vie du parlement européen. La dernière fois c’était la chute du mur qui nous a rassemblés dans une longue transe d’émotion et de congratulations. Cette fois ci c’était le prix Sakharov. Je m’y trouvais moi aussi, dans cet hémicycle, depuis le matin neuf heures. Ce n’est pas le cas de tout le monde… Et notamment des députés d’Europe écologie. Sur le blog du monsieur on lit « un symbole qui n’a visiblement pas été du gout de Jean-Luc Mélenchon qui a ostensiblement refusé d’applaudir lors de la remise du prix aux membres de l’association. Un détail certes, mais certains détails ont parfois plus de poids que de long discours. » En effet, ai-je envie de dire.

L’infâme dans cette affaire c’est que le sujet, le prix Sakharov, n’y est qu’un prétexte. Car le titre me montre du doigt là où il aurait du plus logiquement célébrer le prix remis si c’était vraiment le sujet : « Mélenchon a-t-il un problème avec les droits de l’homme ?». Il s’agit de me viser. Pourquoi ? Surtout sur un sujet où je suis très actif depuis tant d’années.  Il est possible que des gens trouvent cela amusant. Ou que d’autres disent plus justement que l’avis de ce monsieur Schmol leur indiffère. Ce faquin aura peut-être pensé qu’il est glorieux de s’attaquer à un « Nicolas d’or » de ma trempe quitte à se faire essorer ensuite. Ca existe. Ca porte un nom. C’est le complexe d’Erostrate. C’est le nom du paumé qui a mis le feu au temple d’Artémis à Ephèse, une des huit merveilles du monde antique. Mais moi je ne peux manquer d’y réfléchir. Ainsi il aura suffit à cet homme que je n’applaudisse pas au bon moment pour pouvoir aussitôt conclure que j’ai « un problème avec les droits de l’homme ». Ou, plus perfidement pour poser la question, laissant ainsi entendre que je peux toujours démentir. 

Ce n’est pas rien comme accusation même si pour des «prout ! prout !» de cet acabit les mots sont aussi légers que l’air du temps où on les fait voltiger. Je suis juste abasourdi par le procédé. Et par son objet. Il doit être de la génération de Valls et avoir une autre idée de la norme et de la règle en matière d’insultes, sans doute. Quand « mémorial » est né, en France, l’historien trotskiste Pierre Broué, qui fut une référence pour nombre d’entre nous, nous invita à soutenir. On pensait que la mémoire des nôtres, les opposants de gauche assassinés par Staline et les siens serait aussi sauvée du néant. On connait la suite. Les bons morts à l’est sont de droite. Bref, nous fumes cependant nombreux à suivre le conseil de Broué,  je crois.  Pourquoi aurais je soudain changé d’avis ? On m’a dit que je ne devrai pas répondre à une telle bassesse. Si je le fais ce n’est pas sur le fait qui m’incrimine. Ai-je applaudis au bon moment ? Étais-je encore occupé à ma conversation avec Jacky Hénin mon voisin ? A vrai dire je ne m’en souviens pas. Et je m’en moque. Ce qui me retient, c’est la méthode qui est utilisée, ce qu’elle montre comme mœurs dorénavant en vogue. On accuse puis on voit. La rumeur fera le reste. Voit-on vraiment où l’on va avec de tels procédés ?  Non, je crois que non. On ne voit pas. En tous cas Canfin, compte tenu de son pédigrée et des ses exploits de toute nature ne tardera pas à s’en rendre compte pour peu que quelqu’un ouvre la bouche.  Mais Canfin pourra s’en défendre cela va de soi. Ce procédé ci s’appelle une insinuation. C’est le stade qui précède la rumeur. Je suis un modéré en quelque sorte.

Je voudrai récompenser monsieur Canfin, qui a toujours eu un gros problème avec la vérité si j’en crois ce que m’a dit quelqu’un qui l’a entendu dire. J’estime que mon prix de blogueur d’or garantit dorénavant la qualité de mes intentions en matière d’écriture parfois provocante. Me voici donc encouragé à continuer à n’en faire qu’à ma tête ! Je suis blanchi de l’accusation  d’avoir l’habitude d’infliger des notes interminables qui n’ont d’ailleurs même pas toute l’avantage d’avoir des  paragraphes classés dans l’ordre chronologique. Me voici également encouragé à continuer d’illustrer mes lignes avec des photos sans rapport au sujet selon une logique du deuxième et même troisième degré qui m’a valu d’être qualifié de blogueur dadaïste par l’un de mes aimables commentateurs.

De cette façon je suis aussi suffisamment protégé pour me permettre ce qu’aucun homme politique ne peut faire dans ce pays. Je vais citer Fidel Castro. Car comme vous l’expliquerait Pascal Canfin, le monde est composé de la manière suivante : d’un côté les gentils ayant à leur tête le prix Nobel de la paix monsieur Barak Obama, dieu le bénisse, et de l’autre les méchants, masse confuse et composite parmi laquelle se distingue ma méchante face de suspect et la vilaine figure de Fidel Castro, que le diable les emportent tous ! Citer Fidel Castro est donc spécialement stigmatisant. Mais voila : je cherchais comment ne pas répéter ce que j’avais lu de toute part à propos de l’échec consternant de Copenhague. Je me demandais comment exprimer sans trop d’emphase à quel point je crois que ce moment est un bon concentré de ce qui ne va pas durer dans notre nouveau siècle. J’ai acquis la certitude qu’un système qui affiche cette sorte d’impuissance ne peut tenir le choc d’aucun des évènements qui s’avancent. De tels dirigeants ont fait perdre en quelques heures  l’essence de la légitimité de l’ordre qu’ils incarnent. Car la plus sophistiquée des constructions politiques ne peut s’affranchir du devoir d’assumer, peut importe comment, la part de l’intérêt général dont elle est dépositaire. Cette assemblée à Copenhague, s’est dispersée dans la confusion et la cohue après avoir donné un spectacle d’empire finissant autour d’un président des états unis politiquement bafouillant et pitoyable dans son déguisement de prix Nobel de la paix. Je ne vois pas meilleure manière de dire mon indignation qu’en confiant à Fidel Castro le soin de le faire avec le texte qu’il à publié sur le sujet.

Le compte rendu de Fidel Castro: « Ce sont les jeunes que l’avenir concerne plus que quiconque. Encore tout récemment, la discussion portait sur le type de société où nous vivrions. Aujourd’hui, l’on discute si la société survivra… Il ne s’agit pas là de phrases dramatiques. Il faut s’accoutumer aux faits réels.
L’espoir est la dernière chose que les êtres humains peuvent perdre. C’est la vérité en main que des hommes et des femmes de tous âges, mais surtout des jeunes, ont livré au Sommet de Copenhague une bataille exemplaire, offrant ainsi au monde une grande leçon. Le principal, maintenant, c’est que l’on sache le plus possible à Cuba et dans le monde ce qui s’est passé à Copenhague. La vérité possède une force qui surpasse l’intelligence médiatisée et bien souvent désinformée de ceux qui ont en main les destinées du monde.
Si quelque chose d’important a été obtenu dans la capitale danoise, c’est que l’opinion mondiale a pu observer à travers les médias le chaos politique qui s’y est engendré et le traitement humiliant infligé à des chefs d’État ou de gouvernement, à des ministres et à des milliers de représentants de mouvements sociaux et d’institutions qui, pleins d’illusions et d’espoirs, se sont rendus au siège du Sommet, à Copenhague. La brutale répression contre des manifestants pacifiques par la force publique rappelait la conduite des troupes d’assaut nazies qui occupèrent le Danemark en avril 1940. Ce que personne ne pouvait imaginer, c’est que, le 18 décembre 2009, dernier jour du Sommet, celui-ci serait interrompu par le gouvernement danois – allié de l’OTAN et associé à la boucherie afghane – pour céder la salle plénière au président Obama où celui-ci et un groupe sélect d’invités, seize au total, auraient le droit exclusif de parler. Obama y a prononcé un discours trompeur et démagogique, bourré d’ambiguïtés, qui n’impliquait aucun engagement contraignant et ignorait le Protocole de Kyoto. Il a abandonné la salle peu après avoir écouté quelques autres orateurs. Parmi les pays invités à prendre la parole, on trouvait les pays les plus industrialisés, plusieurs économies émergentes et quelques-uns des plus pauvres de la planète. Les dirigeants et représentants de plus de cent soixante pays n’ont eu que le droit d’écouter.
À la fin du discours du seizième élu, Evo Morales, fort de toute l’autorité de son origine aymara, frais réélu par 65 p. 100 des votants et jouissant du soutien des deux tiers de la Chambre et du Sénat bolivien, a demandé la parole. Le président danois n’a pas eu d’autre remède que de la lui céder à la demande des autres délégations. Quand Evo a conclu sa sage et profonde intervention, le Danois a dû la concéder ensuite  à Hugo Chávez. Les deux interventions passeront à l’Histoire comme des exemples de discours brefs et opportuns. Une fois leur tâche dûment remplie, tous deux ont regagné leur pays respectif. Mais quand Obama est sorti de scène, il n’avait pas encore conclu la sienne au pays siège du Sommet.
Dans la nuit du 17 au 18, le Premier ministre danois et de hauts représentants des États-Unis s’étaient réunis avec le président de la Commission européenne et les dirigeants de vingt-sept pays pour leur proposer, au nom d’Obama, un projet d’accord à l’élaboration duquel aucun autre dirigeant du reste du monde ne devait participer. C’était là une initiative antidémocratique et virtuellement clandestine qui ignorait des milliers de représentants de mouvements sociaux, d’institutions scientifiques, religieuses et les autres invités au Sommet.
Dans la nuit du 18, alors que de nombreux chefs d’État étaient déjà partis, les représentants des pays ont attendu jusqu’à trois heures du matin du 19 la reprise des séances et la clôture de la réunion. Pendant toute la journée du 18, Obama avait soutenu des réunions et des conférences de presse. Tout comme les dirigeants européens. Puis ils sont partis.
Il s’est alors passé quelque chose d’insolite : le 19, à trois heures du matin donc, le Premier ministre danois a convoqué la clôture du Sommet. Les ministres, fonctionnaires, ambassadeur et personnels techniques étaient les seuls à représenter leur pays.
Mais un groupe de représentants de pays du Tiers-monde qui contestaient la tentative d’Obama et des plus riches de la planète de présenter comme un accord consensuel du Sommet le document imposé par les États-Unis a livré cette nuit-là une bataille étonnante.
La représentante vénézuélienne, Claudia Salerno, pleine d’une énergie impressionnante, montra le sang qui coulait de sa main droite à cause des coups qu’elle avait dû frapper sur la table pour pouvoir exercer son droit de parole. Le ton de sa voix et la dignité de ses arguments sont inoubliables.
Le ministre cubain des Relations extérieures a prononcé un discours énergique d’un millier de mots dont j’extrais plusieurs paragraphes pour les inclure dans mes Réflexions :
« Le document dont vous avez nié à plusieurs reprises l’existence, monsieur le Président, apparaît maintenant… Nous avons vu des versions qui circulent d’une manière subreptice et qui se discutent en petits conciliabules secrets.
« … je regrette profondément la façon dont vous avez conduit cette Conférence.
« …Cuba juge extrêmement insuffisant et inadmissible le texte de ce projet apocryphe. L’objectif de 2ºC est inacceptable, car il aurait des conséquences catastrophiques incalculables…
« Le document que vous nous présentez ne contient, hélas, aucun engagement de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
« Je connais les versions antérieures qui se sont négociées elles aussi à travers des procédés contestables et clandestins, en coteries fermées…« Le document que vous nous soumettez maintenant omet justement les phrases clefs déjà bien maigres et insuffisantes de cette version-là. « …pour Cuba, cet objectif est incompatible avec le critère scientifique universellement accepté selon lequel il est urgent et incontournable de réduire les émissions d’au moins 45 p. 100 d’ici à 2020 et de non moins de 80 à 90 p. 100 d’ici à 2050.
« Toute proposition de poursuite des négociations en vue d’adopter à l’avenir des accords de réduction des émissions doit inclure impérativement le concept selon lequel le Protocole de Kyoto est toujours d’actualité. […] Votre papier, monsieur le Président, est l’acte de décès du Protocole de Kyoto, et ma délégation s’y refuse.
« La délégation cubaine tient à souligner la primauté du principe des "responsabilités communes mais différenciées" en tant que concept clef des futures négociations. Votre papier n’en dit mot.
« Ce projet de déclaration omet des engagements concrets en matière de financement et de transfert de technologies vers les pays en développement dans le cadre des obligations contractées par les pays développés au titre de la Convention cadre des Nations sur les changements climatiques. […] Les pays développés qui imposent leurs intérêts par ce document interposé fuient tout engagement concret.
« …Ce que vous appelez, monsieur le Président, un "groupe de leaders représentatifs" constitue à mes yeux une violation grossière du principe de l’égalité souveraine des États que consacre le Charte des Nations Unies.
« Je vous demande formellement, monsieur le Président, de faire en sorte que ma déclaration fasse partie du rapport final sur les travaux de cette lamentable, de cette honteuse Quinzième Conférence des Parties.
 
On n’avait concédé qu’une heure aux représentants des États pour émettre des opinions, ce qui a provoqué des situations compliquées, honteuses et désagréables.
Il s’ensuivit un long débat durant lequel les délégations des pays développés ont exercé de fortes pressions pour que la Conférence adopte ce document comme résultats final de ses délibérations.
Un nombre réduit de pays a insisté fermement sur les sérieuses carences et ambiguïtés du document impulsé par les États-Unis, en particulier sur l’absence d’engagement de la part de pays développés en matière de réduction des émissions de carbone et de financement permettant aux pays du Sud de mettre en place des mesures d’atténuation et d’adaptation.
             C’est au terme de discussions longues et extrêmement tendues que la position des pays de l’Alliance bolivarienne des peuples de Notre Amérique (ALBA) et du Soudan en tant que président en exercice du Groupe des 77 a fini par prévaloir :  le document en question était inacceptable par la Conférence.
            Devant le manque de consensus évident, la Conférence s’est bornée à « prendre note »  de l’existence de ce document en tant que position d’un groupe d’environ vingt-cinq pays.
            Une fois cette décision adoptée à 10 h 30 (heure de Copenhague), Bruno – après avoir discuté amicalement, aux côtés d’autres représentants de l’ALBA avec le Secrétaire général de l’ONU et lui avoir confirmé leur disposition de continuer de lutter de concert avec les Nations Unies pour empêcher les terribles conséquences des changements climatiques – a regagné notre pays en compagnie du vice-président cubain, Estéban Lazo, pour assister à la session de l’Assemblée nationale. Sa mission avait pris fin. Il n’est resté à Copenhague que quelques membres de notre délégation et l’ambassadeur pour participer aux démarches finales. Ils ont informé cet après-midi : « …comme ceux qui ont participé à l’élaboration du document aussi bien que ceux qui, comme le président des USA, se sont empressés d’annoncer son adoption par le Sommet… ne pouvaient refuser la décision de celui-ci de seulement "prendre note" du prétendu "Accord de Copenhague", ils ont tenté de proposer un procédé par lequel d’autres pays Parties qui n’avaient pas participé à cette manigance pourraient la seconder et y adhérer, afin de donner des dehors de légalité à cet accord, ce qui aurait pu de fait préjuger du résultat des négociations à venir. » « Cuba, le Venezuela et la Bolivie se sont opposés de nouveau fermement à cette tentative tardive, avertissant que ce document non entériné par la Conférence n’avait pas de caractère légal, qu’il n’existait pas comme document des Parties et qu’on ne pouvait établir aucune règle pour le faire censément adopter… ».« Voilà dans quel esprit que se sont conclues les sessions de Copenhague, sans adoption de ce document préparé subrepticement ces derniers jours, sous la conduite idéologique évidente de l’administration étasunienne… »
Fidel Castro Ruiz  Le 19 décembre 2009 20 h 17


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