fév 12 04
Le nouveau Traité européen arrive

Retour sur la mini séance de Février

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Mercredi et jeudi, on était en séance à Bruxelles au Parlement européen. Le principal sujet de débat était une fois de plus le traité intergouvernemental « sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’union économique et monétaire » (« TSCG »). Ce document est finalisé. La version finale de ce traité a été rendue publique (en anglais bien sûr) mardi midi après que 25 Etats membres de l’UE sur 27 se soient mis d’accord pour le signer. J’ai déjà eu l’occasion de vous parler de ce traité. Vous trouverez sur ce blog une note sur son contenu final. Les modifications qu’il a subies depuis sa première version, présentée le 16 décembre par monsieur Van Rompuy sont pour la plupart marginale. La « règle d’or » renforcée et sa constitutionnalisation sont toujours à l’ordre du jour. Les sanctions automatisées aussi. La Cour de Justice de l’Union européenne pourra même désormais appliquer des sanctions financières si un Etat refuse de transposer la « règle d’or » dans sa Constitution. Quant aux possibilités de modification du Traité, elles ne sont pas évoquées. Ce Traité ne serait donc modifiable qu’au moment où les Etats parviendraient à se mettre d’accord pour le transposer dans le Traité de Lisbonne. Notez qu’une telle modification est loin d’être acquise car elle requiert une ratification par l’ensemble des Etats-membres. Mais les rédacteurs de ce pacte d’austérité ont pensé à tout. Si on lit attentivement les « considérants », on découvre que la Commission prépare la transposition  des dispositions du Traité dans le droit européen via la « méthode communautaire ». Tout le monde évidemment ne sait pas ce que cela veut dire. Cela signifie qu’il y a un pouvoir d’amendement et de rejet du Parlement européen et que les représentants des Etats-membres au Conseil, votent à la majorité qualifiée et non plus à l’unanimité. Dans ces conditions particulières, ce qui est décidé de cette façon s’applique vite à tous sans avoir besoin d’être gravé dans le marbre des constitutions. Jeudi donc, le Parlement européen devait se prononcer sur le Traité finalisé. Avec mon groupe, la GIUE/NGL, nous avons rédigé une résolution qui a été soumise au vote. Elle  dénonce le contenu du Traité et appelle à la tenue de référendums sur sa ratification partout où c’est possible. De plus elle demande la mise en place de consultations populaires partout où des mécanismes de référendums ne sont pas prévus par la loi nationale. C’est le cas en Allemagne par exemple. Nous l’avons voté seuls et nous avons été battus. Puis nous sommes passés à l’examen de la deuxième motion sur le sujet. Celle du programme commun de la droite et des sociaux-démocrates.

Comme lors de la séance précédente, la droite, les libéraux, les sociaux-démocrates et les verts ont présenté une résolution commune. L’Europe du « Oui » à son programme commun : l’austérité. Ils y ont réitéré leur accord avec le fond du Traité et ont à nouveau appelé à son inscription dans le Traité de Lisbonne. Ils n’ont pas envisagé la possibilité d’un référendum. Toute la social-démocratie européenne a voté pour ce texte. Vous êtes donc prévenus : si leurs représentants arrivent au pouvoir vous n’aurez pas le droit de donner votre avis sur ce Traité. Ils transposeront la « règle d’or » dans la Constitution et la feront appliquer. Côté français il n’en ira pas autrement. Car les députés du PS se sont contentés de s’abstenir. Le coup de l’abstention est un grand classique du PS. C’est grâce à cela que le Traité de Lisbonne est passé au congrès de Versailles. Nous avions été 115 parlementaires socialistes à voter contre. Si le reste du groupe avait voté contre, comme nous, au lieu de s’abstenir, le Traité était repoussé et le président était obligé de faire un référendum pour le faire passer. Dans ce cas, de nouveau, c’est la même mascarade qui s’annonce. Car c’est un comble annonciateur que cette abstention. François Hollande en effet, affirme qu’il veut renégocier le Traité. Si c’est bien son intention pourquoi ne commence-t-il pas par désapprouver la version actuelle ? J’ai noté que Vincent Peillon a voté contre. Pourquoi ? Il le dira sans doute. Par contre, les députés de la gauche du PS qui siégeaient se sont abstenus. Ici gît le « Non socialiste » de 2005. Depuis le rappel à l’ordre de François Hollande, ce qui restait de la gauche du PS s’est fait hara-kiri. Quant aux députés d’Europe-Ecologie-Les Verts, leurs votes sont allés du pour au contre en passant par l’abstention. José Bové a voté. De loin on s’est fait un signe d’amitié avec José Bové car il voté contre cette résolution. Nous aussi. Elle a été adoptée.

Un dernier mot encore sur l’actualité européenne. Cela vous a sans doute échappé mais lundi dernier ce n’est pas un mais deux traités qui ont été validés par le Sommet de l’Union européenne. La règle en Europe est de faire compliqué pour que personne ne s’y retrouve. Le second Traité institue la mise en place du Mécanisme européen de Stabilité dit « MES ». Ce MES, c’est l’institutionnalisation de l’actuel Fonds européen de stabilité financière. Les prêts qu’il propose aux Etats en difficulté  ou « à titre de précaution » sont subordonnés à l’application de plans d’austérité infligés par l’Union et le FMI.  Ceux-ci sont à l’origine du martyre actuel de la Grèce. Mais le Portugal et l’Irlande mangent bon eux aussi. Sachez que ce Traité est par ailleurs conçu comme « complémentaire » du Traité sur la rigueur budgétaire (TSCG). Vous ne suivez pas j’espère ? Apprenez ainsi que les rédacteurs des deux traités ont poussé le chantage à l’austérité au point qu’à partir du 1er mars 2013, un Etat n’ayant pas ratifié le Traité TSCG n’aura pas droit à une assistance financière. Le Traité MES donne en outre un droit de véto à l’Allemagne, à la France et  à l’Italie pour décider quel pays aura droit à une assistance financière d’urgence. Il donne aussi un droit de véto à l’Allemagne, la France, l’Italie et l'Espagne pour la date de son entrée en vigueur, d’où l’importance des votes de ratification de ces quatre pays.

Or j’ai été alerté par ma camarade et co-présidente du Parti de Gauche Martine Billard que ce second Traité serait soumis à la ratification de l’Assemblée Nationale dès le 21 février prochain. Il sera soumis à ratification en même temps que l’amendement au Traité de Lisbonne qui permet l’inscription de ce mécanisme et donc du FMI dans le droit primaire de l’Union européenne ! Je rappelle que conformément à l’article 11 de la Constitution française « Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux Assemblées, publiées au Journal Officiel, peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d'un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions. Un référendum (…) peut être organisé à l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales».  Ce Traité entrainant un engagement économique conséquent de la France, le peuple français devrait pouvoir être consulté. Il n’en sera rien bien sûr. Les amis de la liberté au Venezuela et à Cuba n’ont pas l’intention de se rebeller contre un déni de démocratie aussi flagrant. Du temps de l’URSS, les pays du Comécon n’étaient pas traités aussi grossièrement. De toute façon, François Hollande a prévenu qu’il ne demanderait pas de référendum. « Le prochain président » ne sera donc guère différent de l’actuel sur ce point.
 

4 commentaires à “Retour sur la mini séance de Février”
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  1. Daniel FAGUET dit :

    Comment peut-on prétendre que c'est de la faute à la Grèce et leur imposer une telle destruction ? Car, il s'agit bien d'une destruction. C'est une véritable guerre économique au nom de la survie d'une monnaie commune, dont chaque protagoniste, à l'origine, c'est frotté les mains à l'arrivée d'un pays sans véritable structure administrative (donc faible et vulnérable) où les plus tordus ont pu se régaler, s'enrichir avec les aides versées à la Grèce pour devenir un pays moderne. Où sont passées les aides européennes ? Sinon retournées par le biais des entreprises européennes qui sont venus s'enrichirent en glanant les aides versées par leurs propres pays. Il est honteux d'entendre approuver par des membres de gouvernements plus au nord une purge économique mortelle pour la Grèce. Tel des chefs de gouvernements qui "punissent" de toute souveraineté un pays démocrate et dont la souveraineté appartient au peuple et non à des fantoches de la finance totalement déshumanisés où seul le service obséquieux est réservé au "vil dieu argent" de la finance mondiale.

  2. Leisering dit :

    Je crois qu'il n'y a pas grand chose à espérer ni de la commission européenne ni du parlement et de l'intergouvernemental de l'E.U. Les forces en présence sont trop défavorables aux classes populaires. Si un début de reconquête du pouvoir par le peuple est encore possible, cette reconquête passera nécessairement par des décisions politiques nationales qui, si possible, s'efforceront de ne pas pouvoir être légitimement contestées, pour cause de violations des traités... Ces traités, qui ont effectivement pour fonction d'entraver le processus démocratique pour mieux s'en réclamer (en novlangue) au niveau européen, doivent bien avoir quelques failles qu'il doit être possible d'explorer. La délocalisation de Renault au Maroc me donne l'occasion d'évoquer une idée qui, me semble-t-il, pourrait s'introduire dans une de ces failles. N'est-il pas surprenant que le « développement durable » aujourd'hui si souvent invoqué n'est pas encore donné naissance à "une ardente obligation"... de productions durables ? L’autorité gouvernementale d’un pays ne pourrait-elle pas, par exemple, exiger des constructeurs d’automobiles (nationaux et étrangers) que tout véhicule vendu sur le territoire national le soit avec une garantie (entretien/réparation, pièces et main d’œuvre) de 10 ans (ou 250 000 km) ? Ce type de décision réglementaire (élargie à d’autres biens d’équipements durables) serait de nature, me semble-t-il, à favoriser localement le développement de l’emploi dans le secteur entretien/réparation et à diminuer le gaspillage de certaines matières premières (métaux, plastiques…etc.). Et on peut également penser que, le prix de fabrication devenant une moindre partie du prix de vente , les délocalisations industrielles seraient moins intéressante pour les constructeurs. Y aurait-il donc une impossibilité ou une contre indication, à explorer une piste de ce genre ? Une telle volonté politique nationale serait-elle de nature à déroger aux traités de "libre échange" ? Ca ne saute pas aux yeux.

  3. PM dit :

    Le Conseil européen a adopté un traité qui confirme les craintes que j’avais exprimées à l’issue du Conseil européen du 9 décembre 2011. Il n’apporte pas de réponse à la crise. Il reste marqué par une obsession de la discipline budgétaire qui aggravera l’austérité et la récession. Il fait l’impasse sur les impératifs de la croissance, de la solidarité, de la lutte contre les risques financiers, mais aussi du contrôle démocratique des décisions européennes.

    Le combat contre l’endettement public est un combat pour la Gauche

    La responsabilité budgétaire s’impose à tous, dans un contexte de menace sur les capacités d’action de l’Etat. Je l’ai déjà dit et je le répète, le combat contre l’endettement public est un combat pour la Gauche. Parce que quand un Etat est endetté à l’excès, quand le service de la dette devient le premier budget de l’Etat, dans un contexte où il faut réduire les déficits, alors ce sont les services publics qui trinquent. Et si l’on veut retrouver de la souveraineté, si l’on veut retrouver les marges de manœuvre pour développer les services publics, l’éducation, l’hôpital, les services publics locaux, alors il est indispensable de se désendetter. C’est la raison pour laquelle nous mettrons en place, comme François Hollande l’a dit, un cadre national de réduction des déficits et de la dette qui conduit à l’équilibre des finances publiques à la fin du quinquennat. C’est un engagement absolu qui figure en tête du projet de François Hollande. Il ne s’agit donc en aucun cas de remettre en cause cela.

    Dans le même temps, nous sommes conscients que la discipline budgétaire ne suffit pas à remettre la zone euro sur le chemin de la stabilité financière, de la croissance et de l’emploi. C’est pourquoi s’il est élu, François Hollande demandera que le nécessaire rééquilibrage des priorités européennes se traduise, dans un traité renégocié, par des dispositions de nature comparable à celles qui figurent aujourd’hui dans le projet de traité.

    Je veux évoquer plusieurs dimensions.

    La croissance, d’abord. En matière de croissance, nous pouvons penser à la réorientation des instruments existants de la Banque européenne d’investissement, du budget européen. N’oublions pas que nous serons, aussitôt après l’élection présidentielle, dans la négociation des perspectives financières pour la période 2013/2020. Je pense aussi à la mise en place de ressources nouvelles comme la taxe sur les transactions financières, ou encore la taxe carbone aux frontières, pour financer des projets industriels, des projets d’infrastructures, des projets de croissance, des projets dans le domaine de l’énergie. La mise en place de « project bonds » y contribuera aussi.

    Le deuxième domaine dans lequel on peut compléter les choses, c’est la lutte contre les risques financiers qui demeurent une menace pour la stabilité de la zone euro, par une action commune de supervision, de régulation dans le domaine bancaire et financier, et par le...

  4. LE GOUTEUR DE VIE dit :

    Et oui... Pourquoi faire simple lorsqu'on peut faire compliqué !
    J'en reviendrai donc aux fondamentaux : protection sociale, du travail, des entreprises et de la production européenne.
    Les entreprises françaises délocalisent en Europe parce-que cela leur coûte moins cher ailleurs. Conséquence: moins d'emplois pour les Français et augmentation du chômage en France.
    Les autres européens viennent en France pour gagner plus. Conséquence: moins d'emploi pour les Français et augmentation du chômage en France.
    Qu'est-ce qui coûte le plus cher aux entreprises? Le coût social. Au lieu de le diminuer en France (Ump), il faut l'augmenter en Europe (FDG) afin qu'il soit le même partout et que la protection sociale soit tirée vers le haut et partout la même.
    Moyen urgent: le SME (Salaire Minimum Européen). Conséquences: Comme cela leur coûte autant ailleurs, les entreprises ne délocalisent plus et embauchent à nouveau ou conservent leurs nationaux. Le chômage se résorbe. Les autres ne migrent plus pour gagner plus ailleurs puisqu'ils gagnent autant chez eux, ont la même protection sociale et le même niveau de vie. Le chômage se résorbe.
    En ajoutant la taxation des produits entrant en Europe, ceux-ci coûtent alors aussi cher que les productions européennes. Conséquence: on protège la production européenne, les entreprises, le travail, les emplois. Le chômage ne redémarre plus.
    Délai: trois ans pour que les coûts se stabilisent, et les prix aussi.
    Et histoire de mettre un coup de pied dans la fourmilière: passons à la VIe République !
    Allez, Jean-Luc, c'est maintenant ou jamais !
    On est tous avec toi... jusqu'au bout : tu étais notre étendard, nous voulons faire de toi notre drapeau !


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