nov 12 10
Discours de Lisbonne

Vaincre la Troïka

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Le 9 Novembre dernier, j’étais invité à intervenir lors d’une conférence organisée par mes camarades Marisa Matias et Alda Sousa, députées européennes du Bloc de Gauche au Portugal sur le thème de la lutte contre l’austérité imposée par la Troïka. Je n’ai malheureusement pas pu m’y rendre, retenu en dernière minute par un problème sans gravité mais rendant le voyage impossible. C’est donc Céline Meneses, staff du groupe GUE/NGL qui devait m’accompagner sur place et qui avait réalisé la traduction de mon discours en espagnol, qui l’a lu à ma place. Le voici dans sa version française.

 

"Mes chers camarades,

La présence européenne à cette tribune, l'un après l'autre, est un signal important. Ce signal nous l’adressons à nos propres forces politiques, aux femmes et aux hommes dont nous partageons les combats. Mais nous l’adressons aussi à nos peuples. A tous, nous disons que notre union est faite de liens humains, de programmes partagés, d’expériences mises en commun. Nous sommes la nouvelle gauche européenne. Nous sommes en train de prendre notre place ensemble, unis, au cœur des immenses événements qui sont en train de mûrir sur le Vieux continent. Progressivement nous sommes identifiés par des millions de gens comme l'un des moyens qui est à leur disposition pour répondre aux défis que constituent la destruction sociale de nos sociétés sous les coups des politiques néo libérales.

En nous montrant unis, nous nous montrons à la hauteur du moment politique. Nous savons que de toute façon, le moment venu, la solution qu’il faudra ouvrir sera aussi de niveau européen. Nous savons que demain au pouvoir nous ferons équipe pour ouvrir un nouveau chemin en Europe. En face de l’internationale de l’austérité et de la finance, il y a l’internationale de la solidarité et du partage. Nous sommes son outil. Nous voici. Nous existons. Nos forces comptent dans nos pays. Nous ne sommes pas seulement un rêve, nous sommes le commencement de sa réalisation. Si long que soit le chemin qu’il faudra accomplir, nous ne voyageons plus seuls. Chacun de nous renforce l’autre. Le résultat électoral de Syrisa est un atout pour chacun d’entre nous. Je forme le vœu que notre résultat à l’élection présidentielle en France et la façon avec laquelle nous l’avons obtenu vous ait renforcé ici au Portugal. Et vous, au Portugal, quand vous prenez des décisions et que vous agissez, n’oubliez jamais que nous sommes impliqués par vos résultats!

Notre présence à cette tribune ce soir adresse un message au peuple travailleur du Portugal. Elle leur dit qu'il existe en Europe une force politique capable d’être a leur côté pour tourner la page du présent misérable qu'ils vivent. Cette force existe dans chacun de nos pays et chacun d'entre nous et prêts à épauler les autres. Le Bloco et le peuple portugais peut compter sur le Front de Gauche en France comme nous-mêmes nous comptons sur le Bloco et l’action du peuple portugais. Et cela vaut non seulement dans l’opposition comme aujourd’hui mais aussi lorsque nous dirigerons les gouvernements de nos pays.

Camarades,

Vous avez bien entendu. Je vous ai parlé de nos futurs gouvernements. J’exprime une certitude et un appel au sens de nos responsabilités. La chaine qui étrangle l’Europe va craquer. Je ne sais où, je ne sais comment, je ne sais de quel côté. Mais je suis certain qu’elle va craquer. Comme elle a craqué après une terrible décennie perdue en souffrances néo libérale en Argentine, au Venezuela, en Bolivie, en Uruguay, au Brésil, en Equateur !

La chaine va craquer en Europe. Est-ce en Grèce ? Est-ce au Portugal ? Est-ce en Espagne ? Est-ce en France ? Est-ce par un évènement fortuit ? Est-ce par une action de masse ? Est-ce par un effet de système qui provoque la faillite d’un des états ou de plusieurs à la fois? Nous ne le savons pas. Mais nous savons qu’il suffit que la chaine craque en un point, un pays, pour que tout le système bancaire et financier européen entre dans une turbulence généralisée. Et alors nous serons en première ligne. Vous savez ce que cela veut dire ! Il s’en est fallu de peu qu’Alexis Chipras soit le premier ministre de Grèce ! Et alors Alexis aurait dû commencer aussitôt le programme de la révolution citoyenne en Grèce ! Et alors nous aurions été tous impliqués. C’est à cela qu’il faut se préparer ! Nos programmes doivent être ceux d’une radicalité concrète et opérationnelle. Notre action politique doit aider le peuple à se préparer à prendre le pouvoir citoyen lui-même, à tous les niveaux de la société. Nos gouvernements devront savoir immédiatement commencer la planification écologique de la réorganisation de nos sociétés. C’est cela notre responsabilité devant l’histoire contemporaine.   

Au niveau européen, ensemble, nous nous préparons bien. Voyez : ce n'est pas la première fois que nous nous nous retrouvons. Nous prenons l'habitude de participer de plus en plus souvent aux évènements et aux combats les plus importants que nous menons chacun dans nos pays. La dernière fois que je me suis trouvé avec plusieurs d'entre vous, le 30 septembre dernier, je marchais à la tête de la plus puissante manifestation politico-syndicale qu’il y ait jamais eu en France contre un traité européen. Aux côtés des dirigeants français du Front de gauche, il y avait, bras dessus bras dessous, des dirigeants du Bloco, de Izquierda Unida, de Die Linke, de Syriza. Je voudrai remercier le Bloco et ses militants : ils sont venus nous aider à montrer le visage internationaliste, fraternel et européen de notre rejet des oppresseurs comme Merkel et des capitulards comme Papandréou ! le 14 novembre prochain, chacun dans notre pays, nous serons en marche à l’appel de nos syndicats. En France le Front de Gauche jette toutes ses forces dans la bataille. Nous comptons les uns sur les autres pour montrer ce jour-là que l’Europe des salariés et des peuples n’est pas vaincue par l’Europe des banques et de leurs gouvernements. Nous allons puiser de nouvelles forces dans cette démonstration. Nous avons terriblement besoin d’action, de démonstration de force et d’unité pour vaincre la peur et la résignation qui sont les meilleurs relais de nos adversaires.

Camarades,

Le nouveau gouvernement du parti socialiste en France a fait le choix de s’aligner sur la politique d’austérité. Il vient de décider de retirer de la dépense publique un total de cinquante milliards d’euros. La France va donc entrer en récession. Comme la France est la deuxième économie de l’union cela va aggraver brutalement la tendance à la récession qui gagne déjà toute l’Europe. L’Allemagne sera touchée à son tour. Elle souffrira d’autant plus qu’elle est déjà bien plus malade de pauvreté, de vieillissement et d’endettement régional que le dise ses admirateurs. L’arrogance du gouvernement allemand de madame Merkel, son mépris et sa grossièreté pour les pays du sud sont déjà insupportables. Ils vont devenir odieux. Les tensions sociales et régionales dans chaque pays et entre les pays vont donc connaitre un développement impétueux. Dans cette ambiance, l’extrême droite progresse en Europe, non seulement sous ses propres bannières mais par ses idées qui dominent dans un nombre croissant de parti politique de la droite traditionnelle. C’est notre devoir d’être en première ligne, quoiqu’il en coute, pour affronter l’extrême droite, ses idées et ses implantations ! Sinon sur qui compter pour le faire ? Il n’y a donc pas de jours tranquilles en vue pour notre génération politique.

Nous sommes l’un des futurs possibles de l’Union Européenne. Et par conséquent un des points d’appui possibles du futur de la civilisation humaine. Camarade, souvenons-nous que le pire de la crise actuelle ce ne serait pas la durée des souffrances qu’elle va imposer, non, le pire serait que nous soyons incapables d’en tirer l’opportunité de faire naitre un autre monde.   "


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