Alors que François Hollande est en visite en Turquie, je rencontrai, lors de la dernière session à Strasbourg, Pinar Selek, citoyenne turque, harcelée par la justice de son pays.
Voici la lettre que j'ai adressée à M. Hollande à son sujet:
"Monsieur le Président de la République,
Nous vous interpellons au sujet de Madame Pinar Selek, citoyenne Turque. Chercheuse en sociologie à l’Université de Strasbourg, écrivaine mais aussi militante engagée dans les mouvements féministes et pacifistes, Madame Pinar Selek a été condamnée à la prison vie le 24 janvier 2013 par la justice de son pays. Ses travaux de sociologie sur la situation kurde lui ont valu la rancoeur des autorités. Elle a donc été accusée d'avoir perpétré un attentat, rien de moins. Non seulement aucun lien avec elle n'a jamais été prouvé mais il est avéré que l'attentat cité n'était qu'un accident sans aucune signification politique ou autre.
Les irrégularités de son procès ont d’ailleurs été dénoncées par les experts auprès du parlement européen.
Depuis des années, elle fait l'objet d'un véritable harcèlement politico-judiciaire, qui l’a conduite à passer deux ans et demi en prison en Turquie avant d'être libérée en 2000. Elle a été acquittée trois fois : en 2006, 2008 et 2011. Chaque fois la décision d’acquittement a été cassée par la Cour Suprême turque. Cette nouvelle condamnation, à l’issue d’un procès très politique, montre l’acharnement du gouvernement turc à son encontre. Un acharnement qui se poursuit aujourd'hui avec la demande auprès d’Interpol d’un mandat d’arrêt international et la récente demande de procédure d’extradition.
Lorsque la justice sert ainsi des intérêts politiques, toute cause ainsi desservie devient l’affaire de tous. Nous estimons que son combat doit être celui de la France ou elle est réfugiée et pourrait être le vôtre.
La communauté universitaire strasbourgeoise, unanime, lui a déjà apporté son soutien par la voix de son Président, Monsieur Alain Beretz et une délégation d’universitaires s’est rendue à son procès, à Istanbul, en janvier dernier.
Votre parti et votre gouvernement ont également soutenu le combat de Pinar Selek jusqu’à ce jour. La France lui a d’ailleurs accordé le statut de réfugié politique qui la protège pour le moment, de toute extradition.
Cependant, nous estimons que cela ne suffit pas. Il est temps que l’Etat Français rassure Pinar Selek et prenne position officiellement en affirmant qu’elle ne pourra jamais être inquiétée en France.
Nous nous adressons à vous aussi car vous séjournerez en Turquie fin janvier pour y rencontrer les autorités turques. Ce voyage sera le premier séjour officiel d’un Président de la République Française depuis la visite du président socialiste François Mitterrand en avril 1992. Nous vous demandons de relayer l’émoi suscité en France, par la situation de Madame Selek et de faire entendre les valeurs de justice et de la liberté qui sont au fondement de notre République.
Veuillez accepter, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre considération."
Martine Billard et Jean-Luc Mélenchon