Elire ou pas la nouvelle commission européenne présidée par Jean Claude Junker, c’était le sujet essentiel de cette session. Pas banal. Car c’était tout de même un coup de force contre le Parlement qui se jouait. Celui-ci fit bonne figure et vota tout ce qu’on lui demanda sans broncher. Il avait pourtant exprimé ses doutes à propos de 6 des 28 candidats commissaires. Il avait demandé un rattrapage pour 4 d'entre eux ! Comme c’était mignon ! Juncker est passé en force : tout le monde ou rien ! Les lâches qui tortillaient la veille la bouche pleine de leur prétendu « pouvoir du Parlement » se mirent à genoux au premier coup de fouet. Et pourtant, l’impayable Martin Schulz avait fait les gros yeux. « A l’issue des auditions, les commissions parlementaires compétentes avaient conclu que trois commissaires devaient fournir davantage d’informations afin de finaliser leur évaluation » avait-il tempêté ! Voyons cela pour mémoire.
Le Britannique Jonathan Hill, commissaire désigné à la stabilité financière, aux services financiers et à l'union des marchés de capitaux a refusé de s'engager sur un calendrier précis en vue de mettre en place l'union bancaire, le système unique de garantie des dépôts. Il n'a pas essayé non plus de calmer les inquiétudes sur le fait que c'était un candidat d'un pays non membre de la zone euro qui était en charge de la mise en œuvre de l'union bancaire. En effet, même si le projet est ouvert à tous les États membres, seuls les pays de la zone euro participent au projet jusqu'à ce jour. Comment un tel homme avec de telles idées peut-il être là ? Son parcours professionnel répond. Il a été lobbyiste et a fondé sa propre agence de conseils. Bingo ! Ses anciens collègues vont adorer ! Il a répondu qu'il s'était séparé des parts qu'il détenait au sein de son ancienne entreprise, et ce, « moins d'une journée après » sa nomination. Rassurant, non ?
Mieux connu est le cas déplorable de l’espagnol Miguel Arias Canete au poste de commissaire à l'énergie et à l'action climatique. Il est surtout connu pour avoir réduit les subventions aux énergies renouvelables dans son pays et pour être un ancien dirigeant de compagnies pétrolières, aux Canaries, aujourd'hui dirigées par ses fils et dont il est toujours actionnaire. Il a même osé un changement de dernière minute dans ses déclarations d'intérêt financier. Amnistié ! Les mêmes qui le critiquaient vertement ont voté pour lui.
Le Hongrois Tibor Navracsics, candidat pour le poste de commissaire à l'Éducation, à la culture et à la jeunesse, semblait également mal parti. Rappelons que c'est un proche de Viktor Orban, dont le gouvernement promeut ouvertement des politiques discriminatoires envers les Roms et laisse prospérer un antisémitisme de type nazi. Tout est pardonné.
Elu en même temps que Moscovici, son nouveau collègue. Lequel s’est vu adjuger le portefeuille des affaires économiques et financières. Ouf, car tous nos « amis » européen s’étaient déchainés contre lui et contre la France dans des termes souvent inadmissibles ! Il fut tout bonnement accusé d'être un cheval de Troie envoyé par Paris, dont la mission serait de permettre à son pays de laisser filer son déficit sans avoir à subir de sanctions. Vive l’amitié entre les peuples européens ! Triste camouflet pour la France : Pierre Moscovici devra en référer à deux vice-présidents. D’abord le Finlandais Jyrki Katainen, en charge de la croissance et de la compétitivité. Bien connu pour être le chantre de l'orthodoxie budgétaire. Pour ses exploits en la matière, il a été nommé en 2008 « meilleur ministre des Finances d'Europe » par le Financial Times. Autre surveillant du Français, le Letton Valdis Dombrovskis, en charge de la gestion de l'euro et du dialogue social. Une mauvaise farce. Ce dogmatique féroce a imposé à son pays une cure d'austérité pire que celle infligée à la Grèce. Il a laissé son pays dans une profonde récession dont il n’est pas sorti. Désastre assuré. La Commission « de la dernière chance » comme a dit Junker est vouée à faire le malheur du continent.