Vous connaissez tous Erasmus, le programme d'échange rendu populaire avec le film L'auberge espagnole ? Même ça, la Commission européenne, avec l'appui des sociaux-démocrates et de la droite, a trouvé le moyen de le détruire.
En novembre 2011, la Commission européenne présente sa proposition de règlement pour un nouveau programme élargie, Erasmus +, pour la période 2014-2020. On y retrouve les programmes d'échanges plus ou moins connus, dont Erasmus pour les échanges universitaires mais également Grundtvig pour l’éducation des adultes, Comenius pour l’enseignement scolaire etc.
Leur idée est de mettre en place un « mécanisme de garantie de prêts aux étudiants ». Parallèlement à l'échange Erasmus, ils proposent de créer un « master Erasmus » permettant aux étudiants d’effectuer son master complet dans un autre pays participant au programme. Jusqu'ici tout va bien mais les étudiants n'auront pas accès à une bourse de mobilité comme pour l'Erasmus mais aux banques.
Est-il besoin de rappeler qu'aux États-Unis, 40.1% de personnes de moins de 30 ans sont endettés après avoir pris un prêt pour leurs études ? Ce modèle c’est la mort programmée des systèmes de bourses nationales et l'endettement de nos jeunes.
Bien sûr la Commission a commandé une étude "indépendante"… à la London School of Economics, l'Université britannique spécialiste de la dette de ses étudiants.
La Commission européenne insiste sur la « dimension sociale » de cette proposition. Heureusement qu'elle insiste car il faut franchement cligner des yeux. Le remboursement ne démarre effectivement qu’après "une période de grâce". Après 12 mois, un étudiant trouverait du travail. Sans aucun rapport avec la réalité, c’est ce qu’explique par exemple la députée allemande et rapporteure de ce dossier, Mme Pack : il est "facile pour un étudiant qui est parti faire ses études à l'étranger de trouver du travail". Ça n’a pas l’air de fonctionner pour les 57% de jeunes Espagnols au chômage, alors justement qu’ils sont les champions des stages précaires.
Les associations étudiantes européennes, au premier rang desquels les françaises, la Conférence des Présidents d’Universités françaises (CPU), l'Association des Régions de France mais aussi des États nordiques : tous sont inquiets pour les systèmes de bourses, indispensables pour permettre la mobilité du plus grand nombre. Les sociaux-démocrates ont donc fait mine de s’inquiéter pendant tous les débats en commission parlementaire. Que votent-ils au final ? Pour. "Au prétexte que le budget est en hausse" Mais que vaut une hausse du budget si elle sert à instaurer une dette étudiante ?
Certes, le projet reste pour le moment « à titre expérimental ». Pour 7 ans. En fait c’est un nouveau laboratoire pour la financiarisation. La Commission européenne a trouvé ce moyen pour ne pas attaquer directement les bourses nationales et s’octroyer un nouveau champ de compétence face aux réformes universitaires qu'elle trouve trop lentes.
Notre camarade François Delapierre nous avait prévenus dans son livre. "La bombe de la dette étudiante" est pour demain.