Je suis interrogé bien des fois à propos de la sortie de l’Euro de tel ou tel pays. Les questions semblent postuler que ce serait une hypothèse comme une autre. Il n’en est rien. Cette façon de dire me semble négliger un détail. Il n’existe aucun dispositif de sortie de l’Euro prévu par les traités qui régissent l’Europe. On peut théoriquement sortir de l’Union. En pratique cette sortie est d’une complexité et d’une lourdeur institutionnelle considérable. Mais en ce qui concerne le système de l’Euro, rien n’est prévu. Cela ne signifie pas que, du coup, cela ne se fera pas. La vie est plus forte que les traités. Mais je veux juste souligner que l’opération ne saurait être « ordonnée » comme disent, parait-il, les dirigeants conservateurs allemands. Ce sera une noire pagaille aux effets incommensurables sur l’économie de l’union et, par contre coup, sur celle du monde. Notons à ce sujet que les dirigeants allemands feraient bien d’y penser et de ne pas croire leur pays d’avance épargné par ce qui pourrait arriver du fait de leur mesquine et psychorigide façon de gérer la crise.
Je sais qu’il existe à gauche un certain nombre d’amis qui sont partisans de la sortie de l’Euro. Je ne leur fait pas l’injure de les confondre avec les lepénistes qui soutiennent aussi cette thèse mais dans un tout autre cadre d’analyse et de propositions. Ces camarades ont un raisonnement construit avec une forte cohérence intellectuelle. Les circonstances peuvent d’ailleurs réaliser leur attente. Cela seul devrait faire réfléchir plus avant. Peut-on avoir pour projet une situation que la décomposition du système produit mécaniquement ? Je ne néglige pas la force de l’argument réaliste selon lequel la monnaie unique fut installée sur des bases qui travaillaient exclusivement à l’entretien et au développement d’un nouvel ordre néo-libéral spécialement destructeur en Europe. Cela ne suffit pas à me convaincre qu’il serait impossible de changer la règle du jeu tout en conservant la monnaie unique.
Selon moi la monnaie unique est aussi la propriété de la France. Nous avons notre mot à dire sur la façon de la gérer. Pourquoi renoncer à cette position de force? Il y a de nombreux avantages géopolitiques et sociaux à disposer de cette monnaie unique pour peu que son cadre d’existence soit modifié. Ce n’est pas vrai que c’est soit l’euro et le libéralisme ou la fin de l’euro et enfin la possibilité d’une vraie politique de gauche. Je crois que seule une vraie politique de gauche peut à la fois sauver l’euro et nous faire sortir de la crise. A l’inverse, si l’euro venait à disparaitre je pense que notre projet de gauche et nos objectifs révolutionnaires dans l’histoire seraient plus difficiles à accomplir. Je sais bien que, pourtant, la monnaie unique pourrait s’effondrer. On ferait face, cela va de soi. On saurait quoi faire. Mais si l’euro des libéraux disparait au moment où ce sont les libéraux qui sont chargé de gérer les conséquences de cette chute, le grand nombre paiera deux fois. La disparition d’un instrument de mesure commun éloignerait la possibilité et la faisabilité des principaux objectifs de gauche comme l’instauration d’un salaire minimum européen et l’harmonisation des normes sociales et fiscales par le haut. Enfin le coup porté à l’idée d’une unification politique et sociale du vieux continent serait particulièrement sévère. Faut-il rappeler que cette unification est le but permanent de la doctrine de gauche depuis ses origines ? Parce qu’il s’agit de la paix et du bien-être. Tout cela ne peut être oublié. Ni surtout être oublié de quel prix a été payé dans le passé l’isolement national des révolutions victorieuses enfermées dans un seul pays !
Depuis toujours, dans l'esprit, par ma connaissance des pays qui la constituent pour y avoir trainer mes godillots, historique également.
Cette Europe fabriquée trop vite, au nom avant tout "d'intérêts communs au sens pur jus fric", est une aberration monumentale,
Comme toujours, un pantin antinomique portugais à sa tête ? laquelle? asservi total à ceux qui l'ont nommé, après qu'il ait bien magouillé son poste.
A ce titre aussi, au moment de la chute du mur de Berlin, j'ai crié houra! mais en même temps, j'ai pensé : "merde, les prussiens reviennent;"
pour le reste, je twitte, c'est assez efficace. étant trilingue,, c'est encore mieux.
Les ressentiments nationaux dont parle Julie, j'ai une version à soumettre, que cela ne déclenchent pas des guerres "civiles" inter européennes.
Merci pour cette mise au point nécessaire et salutaire.
en effet, je me suis lassée de lire des appels à la sortie de l'euro sur votre blog principal sans réflexion sur les conséquences prévisibles et aussi moins prévisibles. En général, il manque une vision européenne d'une gauche refondée et si vous me permettez, elle vous a manqué un peu aussi à vous avant d'être obligé de vous y confronter en honorant votre mandat. J'avoue que c'était un peu mon idée en vous donnant ma voix .
Maintenant j'apprécie également votre présence physique et surtout intellectuelle autour des questions européennes, clé de tout à mon avis pour pouvoir ancrer une autre Europe à un moment crucial où pourtant votre présence en France est également primordial. Que vos collègues au PE prennent un peu le relais!
Et vos collègues grecques, allemands, comment font-ils? Est-ce que des ressentiments nationaux surgissent également parmi vous? Peut-être quelques impressions lors d'un prochain billet....