Cette semaine au Parlement européen il était question de semestre européen ou comment mieux appliquer l'austérité, d'aide à la délocalisation de l'industrie européenne, et comme toujours quelques provocations bellicistes contre la Russie…
Cette semaine au Parlement européen il était question de semestre européen ou comment mieux appliquer l'austérité, d'aide à la délocalisation de l'industrie européenne, et comme toujours quelques provocations bellicistes contre la Russie…
Au Parlement européen, trois rapports sur ce qu’il convient de faire au plan économique en 2015. Plus neuf, tu meurs !
Le premier rapport préconise une stimulation de la compétitivité européenne. Aaah ! Comment ? Par « une concurrence accrue sur les marchés des produits et services » en rappelant que « les coûts de main-d'œuvre doivent cadrer avec la productivité ». Géniaaaal ! Il enjoint également les États à « réduire les dépenses courantes ». C’est nouveau ça ! Mais, bon, attention ! Des soucis, il y en a aussi. Le rapport « s'inquiète des tendances protectionnistes de certains États membres ». C'est grave ça ! De la joie aussi, il y en a : le rapport se félicite des bons résultats obtenus par les cures d'austérité imposées aux États qui ont « mis en œuvre avec succès des programmes d'ajustement ». Des noms ! Des noms ! Zut, il n’y en a pas. D’ailleurs ça se présenterait très mal d’en donner. Car le rapport doit avouer que « seuls cinq États membres respectent pleinement les dispositions du pacte de stabilité et de croissance (PSC)». Cela devrait suffire à s'interroger… J’ai voté contre.
Second rapport, présenté par un socialiste. Il fait le constat d'une situation alarmante avec 25 millions de personnes sans emploi dans l'Union. Il pose donc les recommandations du Parlement européen sur « l'emploi et les aspects sociaux ». Lesquels ? Poursuivre la consolidation budgétaire et les réformes structurelles. Waooo, enfin du neuf ! Comment ? Il faut réduire la charge fiscale du travail, augmenter l'âge de départ en retraite, aligner les salaires sur la productivité… que des trouvailles ébourrifantes. Génial ! J’ai voté contre.
Le troisième rapport estime que « la libre circulation des marchandises, des capitaux, des services et des personnes présente toujours un potentiel inexploité pour les entreprises et les citoyens en matière d'efficacité, de croissance et de création d'emplois ». Ben voyons ! Une fois ce catéchisme récité il n’est plus question que de renforcer le marché unique. Il s'agit bien sûr « d'éviter les réglementations trop contraignantes », de réduire « la charge administrative au niveau européen » ou encore de procéder à une « surveillance accrue des obstacles existants au sein du marché unique des biens ». Ecoeurant rabâchage. J’ai voté contre.
Dormez en paix : l’Europe vous protège.
Au parlement à Strasbourg. Je vois passer une pile de vote pour des aides aux travailleurs licenciés… En fait une « aide à la délocalisation ». Car l’Union européenne dispose d’un outil d’accompagnement des conséquences sociales de sa désastreuse politique. C’est le fond européen d'ajustement à la mondialisation (FEAM) ! Il est conçu pour « soutenir les travailleurs licenciés, principalement dans les régions et secteurs défavorisés par l’ouverture à l’économie mondialisée ». Dans la novlangue de l’Union, il s'agit ainsi de pallier aux « potentielles conséquences négatives » de la politique de libre-échange.
Cette semaine, les demandes concernaient les salariés de l'industrie. La politique de libre-échange de l'Union européenne fait des ravages. On constate que les produits « hors-UE » et plus principalement en provenance d'Asie sont de plus en plus présents sur le marché européen. Au détriment des producteurs locaux, évidemment. À présent, des secteurs clefs de la production de base sont atteints. Ainsi, l'Union européenne a perdu sa première place dans le monde pour les ventes de produits chimiques. De 35,2% de part de marché en 1992 elle est passée à 17,8% en 2012. En moins de dix ans, la Chine s'est imposée, passant de 8,7 % en 2002 à 30,5 % du marché en 2012. Les différences de coûts salariaux, de fiscalité et de réglementation expliquent évidemment ce renversement. Au détriment d’abord bien sûr des salariés européens. Ici il s’agit de 600 travailleurs polonais licenciés suite à la liquidation de leur entreprise. Idem dans le secteur de l'énergie solaire où 80 % de la production chinoise est exportée vers l'Union. À la demande musclée de madame Merkel, l'UE a renoncé en 2013 à imposer les droits punitifs de 47 % sur les modules solaires chinois soupçonnés de dumping. Dès lors, le prix de vente minimum fixé reste inférieur au coût de production des fabricants européens ! 657 travailleurs allemands licenciés dans ce secteur. Enfin, dans le secteur stratégique de la sidérurgie on constate un recul brutal de la part de marché de l'Union européenne: de 16,6 % en 2006 à 11,7 % en 2011. Dans la même période, la part de marché de la Chine est passée de 33,7 % à 45 %. 708 travailleurs belges licenciés dans ce secteur.
Un nouveau rapport sur le TTIP, (aussi nommé TAFTA, GMT et ainsi de suite) est en cours de discussion au Parlement européen. Rédigé par l’allemand Bernd Lange, membre du groupe socialiste et démocrate (S&D) il est bien sûr favorable au projet de Grand Marché Transtlantique auquel je m'oppose depuis 10 ans. Mais, fait nouveau, il prend quelque peu ses distances avec le « mécanisme de règlement des différends », c'est à dire l'instauration des tribunaux d'arbitrage, en lui opposant les systèmes déjà existants : « Le règlement des différends entre États et le recours aux juridictions nationales sont les moyens les plus appropriés en cas de litige relatif aux investissements ».
Cela aurait dû convenir au gouvernement français. Tout en soutenant ardemment le projet transatlantique, il avait cependant émis quelques critiques contre le mécanisme de règlement des différends. En janvier, Matthias Felk, le secrétaire d'État français au Commerce extérieur, à la promotion du tourisme et aux Français de l'étranger (ouf !) déclarait même que « La France n'acceptera jamais que des juridictions privées saisies par des firmes multinationales puissent remettre en cause les choix démocratiques de peuples souverains ».
Mais, au contraire, dans une note adressée aux élus européens français par les services de Matignon, le 24 février, le Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) défend désormais le mécanisme.
Le SGAE précise ainsi que « même si la France estime que l’inclusion d’un mécanisme d’arbitrage investisseur-Etat (RDIE/ISDS) n’est pas nécessaire avec les Etats-Unis, le projet de résolution tranche de manière un peu trop catégorique cette question. Une approche plus prudente sur ce sujet délicat pourrait être préférable en raison des risques de précédent, avec des États dont les standards juridictionnels ne correspondent pas à ceux qui prévalent aux Etats-Unis ».
« La BCE est une institution fondée sur la règle. Ce n'est pas une institution politique. »
C'est avec ces termes et en arguant des statuts de l'institution que Mario Draghi a rejeté toute aide nouvelle de la BCE à la Grèce. Alors que la Grèce pourrait se trouver en situation de défaut de paiement dès les prochaines semaines à cause de la baisse persistante des recettes fiscales. La BCE ne restaurera un régime permettant aux banques grecques de se refinancer auprès d'elle qu'à condition, bien sûr, qu'Athènes mette en oeuvre les réformes demandées. Et selon Mario Draghi, ces conditions ne sont évidement pas réunies. Refus également du relèvement du plafond, actuellement fixé à 15 milliards d'euros, et qui a déjà été atteint, des émissions de bons du Trésor rachetables par les banques grecques, c'est à dire de dette à court terme. La Grèce ne sera pas éligible non plus aux rachats massifs de dette publique que la BCE s'apprête à lancer cette semaine. Pas question de revenir non plus sur la décision du 4 février dernier d'annuler la dérogation qui permettait d'utiliser les obligations d'État grecques comme garantie pour ses opérations de refinancement, privant ainsi les banques du pays de leur principale source de liquidités. Enfin pas un mot sur le remboursement des intérêts de la dette grecque, c'est à dire le re-versement par la BCE à la Grèce des intérêts qu'elle a elle même prélevés. Prévue pour un montant de 1,8 milliards d'euros, pas un centime n'a été versé à ce jour.
Mais si la BCE ne veut pas aider la Grèce, serait-ce parce que elle aurait tout dépensé ?
Car, hasard du calendrier, dans quelques semaines l'institution inaugurera en grande pompe son nouveau siège construit à Francfort pour 1,3 milliards d'euros.