sept 09 09
Audition de José Manuel Barroso par le groupe GUE/NGL

Parlement et célébrations

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En ce moment il y a une orgie anti-communiste au parlement européen. Ici on n’en finit  plus de célébrer la « fin de l’empire » comme il l’écrive sur leurs fichus panneaux d’exposition. Car il y a une exposition sur ce sujet en ce moment dans les couloirs. Et en avant les panneaux et les panneaux! Solidarnosc, le pape Jean-Paul II, et ainsi de suite à tous les carrefours de ce palais impersonnel de la réaction néo libérale qu’est l’Union Européenne. Beerk ! C’est tellement obsédant et grossier que ça rendrait presque sympathique les perdants de cette histoire puisqu’elle est présentée presque sur le même ton que l’on utiliserait pour parler des nazis. Insupportable ! Mais les nuances, à Bruxelles, on les retrouve vite quand il s’agit des amis, même les moins recommandables. Tout empire n’est pas mauvais au royaume de Barroso. En Commission des Affaires Étrangères nous avons posé la question de savoir pourquoi le Parlement européen n’avait toujours pas dénoncé le coup d'État au Honduras. Et la réponse du chef de la droite a été qu’on verrait ça le jour où on parlerait de Cuba ! Ce n’est pas une plaisanterie ! C’est ce qui s’est dit ! Et ces mêmes amis de la démocratie des droits de l’homme et tout le saint frusquin des prétextes à ingérences, invasions et coups d’état ont fait mieux encore ! Ils ont reçu officiellement, pour reprendre les discussions sur les accords de coopération, l’ambassadeur du Honduras à Bruxelles, partisan public du putsch et récusé par le président légitime. Bon. Mais je ne suis pas venu à Bruxelles cette fois ci pour ça. Je suis venu pour entendre monsieur Barroso plancher devant le groupe de la GUE dont je suis membre.

Le voilà ! le voilà !
Et voici monsieur Baroso devant nous. II commence son petit discours sur le mode monotone et ennuyeux que tout homme important doit se donner pour être pris au sérieux. Puis il s’enflamme quand la salle approche du sommeil attentif que seules connaissent les assemblées d’importants. Pas de danger avec lui. Bras en avant, œil brillant, mouvements d’épaule sarkoziens. La c’est le grand art. Car le verbe est radicalement creux. Il s’enflamme pour mieux ne rien dire. "Je vais vous le dire très franchement (pause et doigt levé) et très directement (nouvelle pause et hochements de tête) au risque de choquer (bond par-dessus la balustrade de tout le torse, puis rythme de mitraillette avec martèlement du doigt dans l’air) : je vais être clair, nous allons faire tout notre possible pour affronter les problèmes qui se posent !" Et ainsi de suite. Malin, monsieur Barroso. De toute façon, autant se souvenir qu’il n’a pas gagné sa place dans une pochette surprise. Et il ne va pas la garder en enfilant des perles. Les députés portugais se déchaînent. Tous sont inscrits dans la séance de questions. Lui ça le fait sourire. A la première occasion il se jette à l’eau avec assurance. Statut de la propriété ? "La commission est agnostique ! La commission n’a jamais rien demandé à ce sujet ! Demandez à vos gouvernements" Et comme ça lui plait de pousser ce genre d’arguments rustiques, hop il passe au cran supérieur : "mais certains ont des services public en monopole et profite du statut de concurrence pour s’implanter chez les autres" Et toc ! Vous voyez ? Il n’est pas manchot pour un rond. Certains de mes collègues font patte de velours et besognent dans le style ennuyeux qui fait bon genre, mais comme ils ne lâchent rien sur le fond non plus, Barroso prend un air navré de déception absolue. Bonne pioche, car ici il n’y a pas une voix pour lui. Si bien qu’il se donne une posture de victime de l’acharnement. Et maintenant, comme l’heure tourne, le voilà qui nous dit qu’il restera avec nous aussi longtemps qu’avec les autres. Donc deux heures. Mais il ne reste plus qu’une demie heure. Petite remarque assassine : dans les autres groupes ils ont limité a une minute de temps de parole les questions. Et pan sur les bavards qui s’épanchent ici pendant quatre ou cinq interminables minutes comme des incontinents. Je me sens visé. Mais quand vient le tour de ma réponse, je ne peux que rougir du compliment qu’il me fait de m’être exprimé « dans la grande tradition française de la rhétorique ». Rassurez vous l’émoi ne dure pas. J’ai déjà été largement régalé de ce type de compliments au Sénat. Je sais donc que la suite va être sévère. Elle l’est. D’une facture assez classique mais bien rodée : "ce n’est pas moi ce sont les États membres qui ne veulent pas." ou bien "Vous faites des caricatures. Libre à vous bien sûr car c’est plus confortable etc. etc." Soyons raisonnables ! Il n’allait quand même pas me remercier de l’avoir essoré ! De tout cela il me reste l’impression d’un homme plutôt affable et bon politicien à la sauce fade de l’Europe encore que son origine méditerranéenne nous sauve du style passe muraille des nordiques et assimilés de l’est européen. Mais comme cela serait bien superficiel de ma part d’en rester à ces impressions d’ambiance, je vais donc passer à votre information concernant le programme de monsieur Barroso. Daté du 3 septembre et arrivé dans ma boite vendredi dernier, il est disponible sur le site européen en version française quoique son auteur, qui parle parfaitement bien le français, nous ait avoué l’avoir écrit en anglais. Cinquante pages. Dans la novlangue européenne lisse et contournée, comptez cent cinquante pages car il faut lire trois fois pour être sûr d’avoir compris. J’ai dit à Barroso que j’informerai mes concitoyens de son propos et je l’ai remercié de l’avoir mis par écrit. Ça prouve que je peux être courtois. Moi aussi je pratique le « in cauda venenum » que je décrivais il y a un instant ! Car quant au fond, je préviens, rien ne me va. Après avoir lu mon commentaire et vérifié que je n’ai pas exagéré chacun pourra aussi se faire une idée de ce que valent les sociaux démocrates qui ont voté pour ce programme et cet homme.

Le social ! le social !

Dans son document de candidature José Manuel Baroso annonce "une attention nouvelle et beaucoup plus soutenue à la dimension sociale en Europe". Je lui ai dit que j’avais d’abord cru à une forme d’humour de sa part mais que je me suis aperçu ensuite qu’il n’en était rien, mais qu’il y avait un vrai malentendu entre nous. Ce qu’il nomme "préoccupation sociale" ne se nommait pas de cette façon chez nous et dans notre esprit de gauche. En effet la question posée n’est pas de "grossir l’enveloppe des aides sociales" mais de faire vivre un système général de sécurité sociale pour tous. Je lui ai dit que nous faisions notre la formule du poète Victor Hugo selon laquelle notre but n’était pas de "soulager la pauvreté mais d’éradiquer la misère". Lui m’a répondu qu’il ne faisait pas d’humour "avec le social". Et ainsi de suite. L’affichage social, volontairement voyant en introduction, trouve vite les mots qui le réduisent au néant libéral. Il se propose de "garantir un travail décent" et de développer "la flexicurité" pour laquelle il plaide à plusieurs reprises pour "établir des principes communautaires de flexicurité à appliquer dans le cadre de parcours nationaux". Ce verbiage d’incitation au démantèlement des acquis sociaux est même accompagné d’une de ces diatribes contre la lutte de classe qui est le charme indépassable de cette sorte d’archaïque. Évidemment cela est dit dans la novlangue eurocratique : il se prononce en faveur de l’individualisation des relations de travail et de la fixation des normes directement dans l’entreprise en appelant à "renoncer au modèle fondé sur des relations industrielles conflictuelles, qui est dépassé, au profit d’une approche plus globale sur le lieu de travail fondée sur l’engagement des travailleurs".

Libéralo-béatitude

Reste que son manifeste de candidature confirme le cours néolibéral de la politique européenne et opte en faveur d’une Commission qui aggravera encore le déficit démocratique de l’UE. Je lui ai demandé comment il pouvait expliquer l’abîme d’abstention dans lequel s’effondre la construction européenne compte tenu de la satisfaction qu’il exprime sur le bilan de l’Union. Il a répondu que la crise ne venait pas de l’Europe ni de son fonctionnement mais des États-Unis. Tel quel. Et d’ailleurs son document ne concède pas la moindre erreur d’analyse ou d’appréciation dans les politiques menées jusqu'à ce jour. Au contraire, Barroso ne voit que des succès dans "le marché unique qui a démontré sa résistance" ou encore la "monnaie unique" comme "socle de stabilité". Il prétend même "avoir fait de l’élargissement un succès", sans préciser bien sûr dans quel domaine et pour qui … Il ne voit pas non plus la moindre responsabilité de l’Europe et de ses politiques libérales dans la crise financière et n’a pas peur d’affirmer que ce serait au contraire "la méfiance » vis-à-vis de l’Europe « qui a trop souvent causé des failles dans notre système : elle a contribué aux défaillances de notre système de régulation financière, si brutalement mises en lumière l’an dernier". Amis partisans du non au référendum vous voila démasqués ! D’ailleurs, à un mois du nouveau référendum destiné à faire plier les Irlandais, Barroso exalte à chaque occasion le traité de Lisbonne, "qui je l’espère sera bientôt ratifié, nous fournira la capacité institutionnelle nécessaire pour agir". Comme d’habitude chez les partisans du Oui, le Traité de Lisbonne est paré de toutes les vertus : en matière de politique économique, de diplomatie, d’efficacité institutionnelle, de droits des citoyens et des Parlements … sans jamais que ces avancées virtuelles ne soient pourtant précisées ou explicitées. Ni prise en compte la moindre critique de ses opposants. Une euro-béatitude tranquille et imperturbable, comme un orchestre du Titanic.


Priorité à la libre concurrence

Donc, ceux qui s’inquièteraient de savoir si leur José Manuel n’a pas dérapé par démagogie électorale doivent se rassurer tout de suite. Sur le plan économique, Barroso martèle les dogmes néolibéraux qui sont au cœur des politiques européennes : "attachement à des marchés ouverts", "défense acharnée du marché intérieur et des règles de concurrence et relatives aux aides d’Etat". Au cas où certains viendraient à douter de sa fermeté libérale en ces temps de crise, il promet que "la commission continuera de se montrer implacable dans sa défense du marché unique en tant que clé de voûte des traités et fera tout ce qui en son pouvoir pour le défendre". Implacable ! Vous voici prévenus ! Et il répète comme il l’a fait lors de tous les sommets européens que "les plans nationaux de sauvetage et de recapitalisation ne doivent pas créer de distorsions sur le marché unique". Il appelle d’ailleurs à aller encore plus loin dans la libéralisation puisqu’il propose de "lancer une analyse approfondie sur les « chaînons manquants » du marché intérieur". Et il promet de "faire d’avantage notamment pour ouvrir le marché aux services financiers" et de continuer "d’éliminer les obstacles à l’entrée sur le marché" dans les télécoms et l’internet. Au détour de son plaidoyer, il fait aussi un aveu énorme qui en dit long sur le deux poids deux mesures dans l’application des règles de concurrence : "la Commission a approuvé, depuis le mois d’octobre dernier, environ 3 600 milliards d’euros d’aides d’Etat en faveur du secteur financier, soit près d’un tiers du PIB de l’UE". En dépit de cette générosité en faveur des banques, il exclut par avance toute mesure de relance supplémentaire : "La marge de manœuvre pour de nouvelles mesures de stimulation de la demande dans l’UE est très limitée, car une nouvelle relance budgétaire généralisée pourrait susciter des réactions négatives des marchés". Car en matière de discipline budgétaire des États, Barroso assigne carrément à la Commission un rôle de chien de garde des marchés financiers en proposant qu’elle soit "en mesure d’apporter aux marchés l’assurance que la progression récente de l’endettement public sera inversée". Mais du modèle économique construit sur l’économie de la dette privée en extension permanente, rien. Mais, pourtant, « elle tourne » et la crise est quand même venue de l’explosion de la bulle de la dette privée insolvable, non ? Non. Pour José Manuel Barroso, les marchés, dieux tutélaires de la dernières décennie sont toujours bien vivants et voyants extra lucides. Il ne faut interrompre aucun sacrifice humain dont ils se régalent. Barroso promet à plusieurs reprises de nouvelles vagues de déréglementation pour "accroître la compétitivité et réduire la charge administrative" et "éliminer les procédures bureaucratiques et toute centralisation inutile". Il se déclare "résolument attaché à une politique qui continue de supprimer les charges administratives inutiles" Et promet que "d’ici 2012, la prochaine commission réduira conformément à notre engagement, la charge administrative de 25 %". Bref il ne s’est rien passé au royaume parfait du libre marché non faussé qui fasse hésiter ou même réfléchir l’implacable gardien du dogme. Comme lors de chaque sommet européen ou international, Barroso défend sans blêmir le libre échange. Il plaide à plusieurs reprises le "rejet de toute forme de protectionnisme économique". "Ce serait, nous a-t-il dit, le retour du nationalisme. Et le nationalisme c’est la guerre". Donc ceux qui veulent des barrières aux frontières de l’Europe veulent la guerre. Ce n’est pas dit mais c’est pensé assez fort pour qu’on l’entende. Dans une véritable croisade mondiale, il considère que l’Europe doit "dès à présent prendre la tête de la lutte contre le protectionnisme sous toutes ses formes". Et il précise la cible : "les entraves non tarifaires constituent à présent, dans de nombreux cas, le principal obstacle". Ce qui signifie qu’il ne faut pas compter sur lui pour soutenir un bouclier douanier contre le dumping social ou écologique. Il l’avait d’ailleurs indiqué en s’opposant à tout débat sur une taxe carbone européenne proposée par Sarkozy. Il répète enfin que "la conclusion du cycle de Doha [le nouveau cycle de libéralisation des échanges impulsé par l’OMC] reste la priorité absolue". Après avoir plaidé pour "investir d’avantage dans le développement durable", Barroso explique aussi que "tout cela ne se résume pas à faire le nécessaire pour l’avenir de notre planète : l’Europe s’apprête à tirer un bénéfice énorme de ses investissements dans les nouvelles technologies à faible émission de carbone" Crise écologique ou pas, la priorité reste donc d’alimenter à tout prix le capitalisme. C’est pour cela qu’il appelle l’Europe à "prendre la tête de la lutte contre le réchauffement climatique". Mais sans la moindre critique du précédent sommet européen en la matière qui fut une honteuse palinodie.

Un impérialisme assumé
Tant de certitudes intellectuelles aussi imperméables à la critique créent un climat mental. Il s’exprime dans une arrogance impériale assumée. D’emblée Barroso assigne à l’Union Européenne l’étrange objectif de "diriger, façonner la mondialisation en nous fondant sur nos valeurs et nos intérêts" plutôt que de "laisser l’initiative à d’autres et accepter qu’ils orientent le cours des choses." "Façonner" le monde ! Bigre ! C’est une conception des relations internationales comme champ d’affrontements et de dominations plutôt que comme un espace de coopération et d’égalité entre nations ou ensembles régionaux. Dans cette perspective le conflit est sousjacent et central. Elle ignore l’enjeu de la recherche pacifique et mondiale d’un intérêt général humain. Pourtant la crise écologique devrait lui y faire penser, non ? Non. Il n’y pense pas. Et il ne se rend manifestement pas compte de la connotation lourdement impérialiste et agressive de ses propos en plaidant en faveur de "notre influence sur le développement d’un nouvel ordre mondial" ou en affirmant que "l’heure de l’Europe a sonné". Cette prétention ahurissante au leadership mondial tourne parfois carrément au délire prophétique comme quand il affirme, sans le démontrer d’ailleurs que "l’UE est la voie vers un meilleur avenir pour nous, nos enfants et le reste du monde" et que "des partenaires du monde entier voient dans l’UE une source d’inspiration et attendent d’elle qu’elle leur indique la voie à suivre". Je n’ai pas eu le temps de lui demander comme je l’avais prévu à quel pays il pensait. Oui, quel pays a déclaré qu’il demandait à l’UE de lui montrer la voie ? Et ce que l’Europe a à proposer au reste du monde, ce n’est pas ses acquis sociaux, quoi qu’il ait juré sur ce point à l’oral, ou même la démocratie, mais son expérience de "laboratoire pour la coopération supranationale transfrontalière". Barroso propose ainsi rien moins que d’exporter au niveau mondial le système communautaire car "l’UE est le laboratoire naturel de la mondialisation, appelée à défendre d’instinct la gouvernance mondiale" Et elle est donc, par une sorte de prédestination magique "le champion de la gouvernance mondiale dont notre planète a besoin aujourd’hui". Comme il est possible que vous ne me croyez pas je me répète en vous renvoyant au site européen qui permet d’accéder à cette merveille post impérialiste.

Des nouvelles du grand marché transatlantique

On devine la suite. Ainsi lancé, José Manuel Baroso est en bon chemin d’adhésion au schéma mental nord américain. La relation transatlantique est donc le seul partenariat bilatéral que Barroso aborde explicitement. Il présente même ce partenariat comme un modèle : "les dialogues transversaux, tels que le Conseil économique transatlantique (CET) avec les États-Unis, notre principal partenaire en matière d’échanges commerciaux et d’investissements, sont un moyen efficace de structurer les relations avec les principaux partenaires commerciaux". Même s’il n’aborde pas directement le projet de Grand marché transatlantique, Baroso propose de "saisir l’occasion qu’offre la mutation de l’environnement international pour approfondir les partenariats stratégiques avec nos principaux partenaires bilatéraux, tels que les États-Unis" qui sont à nouveau le seul pays spécifiquement cité. Quand je lui ai demandé s’il maintenait l’objectif d’un espace dérégulé avec les Etats-Unis pour 2010, il a pris l’air préoccupé de quelqu’un qui n’aime pas qu’on résume les sujets. Puis il a déclaré que ce ne serait pas le cas en 2010. Mais que le développement de cette intégration était essentiel pour l’Europe et notamment par le biais du CET (voir plus haut) afin de supprimer graduellement les barrières qui entravent le commerce. Bref, rien de nouveau. L’objectif est bien maintenu. Mais mal assumé …

La démocratie européenne va très bien, merci
Barroso ne voit pas l’ombre d’une crise démocratique en Europe. Il considère même l’UE comme "le système démocratique (!) transnational le plus étendu de la planète". Il ne dit donc pas un mot de l’abstention record lors des dernières élections européennes mais concède volontiers qu’il faut "placer les citoyens au cœur du projet européen". Bla, bla, bla. Pour lui cela se résume à un problème de communication :"les institutions et l’UE ont échoué à faire comprendre ce que l’action européenne signifiait concrètement pour les citoyens : quels avantages les Européens titrent-ils du marché unique, de l’ouverture des marchés et de la régulation dans les secteurs de l’énergie ou des télécoms, de la politique de la concurrence ou des fonds structurels ? ". Le problème des relations avec les citoyens est donc avant tout décrit comme problème de communication et d’information. Les choses iront mieux quand les citoyens auront mieux compris tout ce que l’on fait de bien pour eux : "Les politiques européennes doivent produire des résultats pour les citoyens. C’est ainsi que nous comblerons le fossé entre la réalité de l’intégration européenne et les perceptions de la population." Je lui ai dit que les citoyens ne se détournaient pas de l’institution européenne parce qu’ils ne savaient pas a quoi elle servait mais au contraire parce qu’ils savaient très bien à quoi s’en tenir à son sujet. Et encore davantage au sujet de l’inutilité des votes qui ne changent rien à ce qui se décide ensuite comme on l’a vu avec les référendums français et hollandais. Air navré de l’impétrant. Il ne changera pas d’avis. Et d’ailleurs il l’écrit. Pour lui, les citoyens ne sont pas les détenteurs de la souveraineté mais de simples interlocuteurs au milieu d’autres : "le dialogue avec les citoyens et les différents acteurs de la société civile continuera de revêtir la plus haute importance". Dès lors sa politique se résume à "garantir la transparence des processus de décision" et à « mieux communiquer". Fermez le ban !Quant au rôle du Parlement européen, il reste subordonné et limité à ce que la Commission voudra bien lui concéder, comme le montre cette phrase qui en dit long sur l’absence de garanties institutionnelles existant dans les traités à ce sujet :" je réfléchirai aux moyens d’aider le Parlement européen à exercer son droit de contrôle sur l’ensemble des décisions politiquement importantes". Je lui ai demandé pourquoi il n’avait pas commencé à y réfléchir au cours de son précédent mandat. Et qu’est ce qu’il allait nous proposer en supposant que ce soit un vocabulaire normal pour un exécutif. Il n’a pas répondu. Mais je reconnais que ce n’était pas vraiment une question et plutôt un persiflage…. N'empêche qu’on ne peut avoir de doute sur ce qu’il pense vraiment. Il suffit pour s’en convaincre de constater sur quel ton il parle de son pouvoir. En introduction et en conclusion, Barroso martèle : "J’utiliserai pleinement les pouvoirs de la Commission". Le Parlement européen est donc prévenu. Il décrit la Commission, "moteur du projet européen", comme une sorte de Dieu jaloux omniscient et infaillible qui saurait mieux quiconque ce qui est bon pour l’Europe : "seule la Commission a l’autorité, la capacité administrative et l’expertise technique nécessaires pour présenter des propositions tenant compte des intérêts de l’ensemble des États membres et de tous les citoyens ; elle seule a la vision à long terme requise pour aborder les grands enjeux du monde actuel. Seule la Commission jouit de l’autorité et de l’indépendance nécessaires pour garantir un traitement égal à tous les États-membres". On se pince. Il propose certes un partenariat institutionnel au Parlement européen. Bon. Étrange vision de la démocratie parlementaire. Mais ce qui est bien classique ce sont les mises en garde adressées aux socialistes et sociaux démocrates. Car il précise que le partenariat sera basé sur un"consensus clair sur notre vision de l’Europe". Son objectif politique est de "dégager un consensus parmi l’ensemble des forces pro-européennes". C’est la stratégie désormais classique des libéraux pour imposer sans débat la "seule politique possible" au nom du "gouvernement des meilleurs". Et toutes les critiques et oppositions à sa politique au sein du Parlement sont donc par avance suspectées d’être anti-européennes. Les socialistes qui vont voter pour lui sont prévenus. Cette fois ci ce n’est pas d’accord technique dont il est question. Mais de pacte politique. Les socialistes allemands, espagnols, portugais, anglais et combien d’autres ont déjà dit oui. Comme disait Martine Aubry en campagne électorale des européennes à Toulouse où tout ces beaux merles étaient venus la soutenir : "jamais nous n’avons été si proches au PSE ni si unis sur des solutions de gauche." Madame est servie !


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