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abeilles pesticides melenchonLe Conseil de l'académie des sciences européenne (Easac) est un organe scientifique de l’UE fondé en 2001. Il rassemble les académies scientifiques des États membres. Voici qu’il vient de remettre à la Commission européenne un rapport accablant sur les pesticides contenant des néonicotinoïdes. En effet ces pesticides sont directement mis en cause dans la disparition des « insectes pollenisateurs ». Il s’agit dans 80% des cas des abeilles. Il s’agit d’une question essentielle pour la sécurité alimentaire mondiale. Pas de pollinisation, pas de fruits, pas de légumes, pas de reproduction végétale.

Se basant sur près d’une centaine d’études, les auteurs du rapport soulignent le fait que « l’utilisation généralisée des néonicotinoïdes a des effets graves sur une série d’organismes » qui sont responsables de la pollinisation et la lutte naturelle contre les parasites ainsi que sur la biodiversité. En effet ces pesticides ont un effet dévastateur sur les insectes pollenisateur (les bourdons, les abeilles solidaires, les bombyles ainsi que les papillons, …) : désorientation des insectes, perte des fonctions cognitives, longévité des reines en baisse, synergie avec des pathogènes existants… De plus, les néonicotinoïdes semblent agir sur leur cerveau comme la nicotine chez les humains. Les insectes sont donc paradoxalement attirés par des substances qui les tuent. Enfin, ces pesticides sont systémiques. Cela signifie qu’au lieu d’être pulvérisés sur la plante selon les besoins ponctuels, ils sont présents dans la plante durant toute sa durée de vie, et restent ensuite dans les sols pendant de nombreuses années. Ainsi ils peuvent être absorbés à tout moment par les insectes : dans le nectar récolté et utilisé pour la consommation de la colonie, dans le pollen récolté et utilisé pour l’élevage du couvain et dans l’eau issu de la guttation, cette sorte de transpiration des plantes, très utilisée par les abeilles.

Mais l'Union européenne tarde à agir. Elle avait mis en place, en 2013 et sous pression de la France, un moratoire sur l'usage de seulement trois des pesticides contenant des néonicotinoïdes (clothianidine, thiaméthoxame et de l'imidaclopride). Ce moratoire doit être re-examiné sous la pression de l'agrochimie allemande d'ici fin 2015. En effet les allemands sont les plus gros producteurs de produits chimiques. Et l'usage de ces néonicotinoïdes a été popularisé par les firmes allemandes. C’est le cas de Bayer en 1993 avec le Gaucho qui a été finalement interdit sur de nombreuses cultures dès 1999 compte tenu des conséquences avérées sur les populations d'abeilles. Puis avec le pesticide Régent, développé par le groupe allemand BASF en 2002 et qui sera interdit en 2004. Le lobbying des producteurs de pesticides empoisonne bien les prises de décisions européenne comme l'a montrée Corporate Europe observatory (CEO) qui traque les lobbies dans les instances européennes. Les industriels n'hésitent pas sur les arguments pour infléchir le processus de régulation. Lors de la mise en place du précédent moratoire en 2013 CEO a pu observer le procédé : Production d'études pseudo-scientifiques sponsorisé démontrant évidement tous les bienfaits des pesticides. Pression sur l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) qui selon Bayer «  a des connaissances limitées en agriculture ». Ces méthodes ont fait leurs preuves : lors du vote au Conseil le 15 mars 2013, l'Allemagne s'était abstenue afin de protéger son industrie agro-chimique. Le « poison allemand » est aussi un pesticide ?

En France ces pesticides font aussi des ravages. Mais pas selon le gouvernement. Et malgré sa feuille de route « verte », présentée début février, dans laquelle il avait assuré que la France mènerait « au niveau européen une action volontariste » pour que les substances néonicotinoïdes des pesticides soient réévaluées « au plus vite » l'interdiction ne semble pas être à l'ordre du jour. Ainsi pour Stephane Le Foll, ministre de l'agriculture, interdire les néonicotinoïdes n’est pas la solution. « C’est un pensée globale qu’il faut avoir », assure-t-il, permettant de « mener ces débats en assurant les transitions nécessaires ». En résumé : on continue comme avant. Pourtant, des voix s'élèvent pour s'opposer aux pesticides. La critique écologiste ne vient pas des Verts, mais des « frondeurs » du PS. Delphine Batho et Gérard Bapt ont déposé un amendement à la loi sur la biodiversité réclamant  l'interdiction à partir du 1er janvier 2016 de l'usage des cinq insecticides néonicotinoïdes présents en France, dans le cadre de l'examen de la loi sur la biodiversité. 

L'amendement a été voté à l'Assemblé Nationale le 19 mars au grand dam de la ministre de l'écologie Ségolène Royal, qui, abandonnant la souveraineté de la France, s'opposait à l'amendement au motif que « le cadre européen ne permet pas une interdiction stricte ». L'amendement a cependant peu de chance d'être maintenu au Sénat, qui a rejeté en février dernier une résolution demandent l'interdiction des mêmes pesticides. Peut être la preuve que dans le cadre du PS, toute action de fronde est finalement inutile.


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