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paysbasLes Pays-Bas ont la tradition de faire des referendums sur les questions importantes nécessitant l'avis des citoyens. On se souviens par exemple que les Hollandais avaient rejeté le Traité de Constitution européenne, quelques jours après les Français, par un referendum déjà. Ce mercredi 6 avril, ils votaient encore, sur des question européennes : la ratification par les Pays-Bas de l'accord d'association entre l'Union européenne (UE) et l'Ukraine. 

Rappelons que c'est justement cet accord d’association qui a été l’élément déclencheur de la révolte ukrainienne en novembre 2013. L’annonce de l’abandon des négociations par le président ukrainien d’alors, Viktor Ianoukovitch, une semaine avant le sommet où il devait être signé, avait déclenché des manifestations qui ont abouti à une guerre ayant fait près de 10 000 morts et plus d'un millions de déplacés.

Décrit en son temps par François Hollande comme représentant une « lueur d'espoir pour le peuple ukrainien », rappelons que cet accord a entraîné des sanctions et contre-sanctions russes et affaibli des pans entiers de l'économie européenne. Et alors que dans le même temps une aide de 11Md € a été accordée par l'UE à l'Ukraine, son économie reste en grave récession, et ne fonctionne que sous perfusion du FMI, de Washington et de l'UE. Avec un salaire minimum de 50€ et un salaire moyen autour de 200€ (soit un prix du travail inférieur de 30% au chinois), l'Ukraine représente surtout une destination de choix pour les délocalisations d'entreprises industrielles européennes. D'où l'empressement de l'Union européenne à finaliser l'accord qui a finalement été conclu en juin 2014, ratifié par les États membres en septembre et en vigueur depuis le 1er janvier. Largement soutenu par les États-Unis et sonnant de facto la fin du partenariat économique entre l'Ukraine et la Russie, l’accord d’association est le résultat d'une diplomatie de l'Union alignée sur Washington. Il montre la totale déconnexion entre les intérêts des peuples, qu'ils soient membres de l'UE, russes ou ukrainiens et l'administration bruxelloise.

Mais depuis le 1er juillet 2015, une loi néerlandaise permet d’appeler à un référendum consultatif sur un texte législatif si l’on a pu recueillir 300.000 signatures. La pétition contre l'accord de libre échange en a, elle, récolté 470 000, aussi un referendum a dû être convoqué. Avec une participation au delà du seuil de 30% du corps électoral nécessaire à sa validité, cette consultation a placé le « NON » largement en tête (61%). Cependant, selon la loi néerlandaise sur le référendum, ce vote n’est pas contraignant ; le texte devra maintenant être soumis au Parlement et au Sénat. Mais le Premier ministre libéral Mark Rutte, dont le parti a pourtant fait campagne pour le « Oui », a clairement indiqué qu'au vu du résultat du referendum une « ratification de l'accord sous sa forme actuelle ne semblait pas possible ». Pour autant si le gouvernement néerlandais se refuse à ratifier l’accord UE-Ukraine, celui-ci ne sera pas entièrement caduc. Car les éléments relevant de la compétence exclusive de l’UE, parmi lesquels on trouve le commerce, et qui sont en vigueur depuis le 1er janvier  pourront rester en place. Seule une décision du Conseil européen pouvant suspendre ces éléments, ce « temporaire » pourra donc rester en vigueur longtemps et ainsi annuler le vote néerlandais. Le président ukrainien relativise ainsi les conséquences de ce vote pour son pays en assurant « Nous allons continuer à nous rapprocher de l'Union européenne ».

Le rejet de cet accord sanctionne la politique de voisinage de l'Union européenne, mais aussi plus largement les politiques européennes dont les peuples européens sont dépossédés, et dont ils tentent aujourd'hui de se ré-emparer. Jean-Claude Juncker l'a bien analysé comme tel en déclarant avant le vote qu'« un rejet du texte provoquerait une crise continentale qui déstabiliserait l’Europe » révélant ainsi la crainte que constitue pour les institutions européennes l'irruption de la démocratie. C'est cette peur qui a d'ailleurs permis de renforcer le camp du « Non » dans sa capacité à mettre la pression sur l'UE. Il ne faut pourtant pas avoir d'illusions sur les conséquences de ce vote dans le dossier ukrainien. L'Union européenne n'est pas une entité démocratique. Le vote des peuples n'y a aucun poids. Une nouvelle fois, les Hollandais votaient « Non », comme en 2005. Et comme alors, ce sera pour rien. Seule la sortie des traités peut changer la donne en Europe.


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