jan 12 21

A Strasbourg, je suis arrivé après l’élection avec la droite du social-démocrate Martin Schulz. On connaît les cris d’orfraie de la socialiste Catherine Trautmann contre la rude secouée que j’ai faite à cette social-démocratie européenne en pleine collusion avec la droite. Cet épisode, si vous découvrez le sujet, vous pouvez le retrouver en revenant à la note précédente. N’empêche que je me demande pourquoi le nouveau président éprouve le besoin d’aboyer de cette façon pour nous parler ! Les autres allemands parlent d’habitude avec grâce et parfois même un peu d’onction comme mon camarade Oskar Lafontaine. Pourtant Schulz était libraire et pas marchand de chiens tout de même ! Je n’ai rien compris à ses explications à propos du vote sur les vice-présidents. Mes voisins non plus, et même Helmut Scholz, qui pourtant parle allemand puisqu’il est élu de Bavière et riait à gorge déployée en entendant le charabia procédurier vociféré par notre nouveau président. Ce n’est pas grave j’ai encore voté blanc. J’ai bien noté qu’il n’y a plus un seul vice-président français dans la nouvelle équipe. Notez-le aussi. Ça aide à se faire une idée de la place de la France sous Sarkozy. Pendant cette session le « néo-fasciste » Viktor Orban, premier ministre hongrois, est venu plaider sa cause devant les « européens qui s’inquiètent » bruyamment de ses comportements et législations liberticides. Les mêmes parlementaires indignés et inquiets l’avaient pourtant copieusement applaudi après son discours en tant que président de l’Europe pour six mois. L’UMP français Joseph Daul, président du groupe de droite, l’avait même embrassé devant tout le monde au pied de l’hémicycle. Les élus Verts et nous, avions mis un bâillon sur notre bouche par solidarité avec la presse bafouée et les fonctionnaires persécutés en Hongrie. Que s’est-il passé pour que Orban se fasse lâcher par la droite ? Un fait essentiel du point de vue des droits de l’homme : parmi diverses mesures insupportable Orban a agressé la Banque centrale européenne. Ça c’est trop ! Il n’y avait donc pas de mots assez durs pour flétrir Orban. La preuve : il fut même traité d’émule de Chavez et Castro. Subtil, n’est-ce pas ? De tels chiens de garde du système ne méritent pas qu’on tienne compte de ce qu’ils disent. Orban est un danger d’autant plus grand qu’il est combattu avec de telles méthodes et par de tels personnages ! Car les mêmes « européens inquiets » ne disent mot de la présence d’un parti ouvertement et publiquement fasciste en Grèce. Donc pour eux certains fascistes sont bel et bien insupportables et d’autres non. Tout dépend de ce qu’ils pensent de la Banque centrale. On s’en doutait. Mais que c’est étrange de devoir le vérifier !

L’événement politique de cette session parlementaire c’était le vote d’une résolution concernant le futur nouveau traité européen. Je ne reviens pas à cet instant sur son contenu qui durcit les critères d’austérité et les rend constitutionnels dans chaque pays. Il est en cours de négociation entre les représentants des gouvernements des Etats membres. Il faut connaître la procédure pour apprécier tout le piège de ces sortes de résolutions présentées en commun par plusieurs groupes politiques qui sont pourtant censés être différents. La rédaction de ces résolutions se déroule de la façon suivante. Chaque groupe rédige d’abord la sienne. Puis les groupes négocient une résolution commune. Ce texte est alors signé par ceux des groupes que le compromis satisfait. Au moment du vote on commence par ce document commun. Il est adopté et alors tous les autres textes tombent sans être soumis au vote. Cette fois-ci il y a eu une variante. Beaucoup étaient déjà d’accord avant même la phase du compromis. La droite (PPE), les libéraux démocrates (ALDE), les sociaux-démocrates (SD) et les verts (Verts/ALE) proposaient chacun une résolution en tous points identique. Curieux, non ?  Interloqué, le délégué de mon groupe a tout de même voulu se rendre à la réunion de négociation de la résolution commune. En vain. Il n’y en avait pas. La droite, les socialistes, le centre et les verts lui ont aimablement expliqué que tout était déjà arrangé entre eux ! La résolution commune de la droite, des sociaux-démocrates et des verts n’a bien sur rien de commun avec celle que nous avons rédigée au groupe GUE/NGL.

Dans leur texte, pas de dénonciation de la « règle d’or » renforcée que ce traité impose « de préférence au niveau constitutionnel ». Leur problème n’est pas le contenu « austéritaire » du traité. C’est le fait que ses « objectifs essentiels peuvent être atteints de manière plus efficace grâce à des mesures prises en vertu du droit de l'Union », via la méthode communautaire. Ce charabia signifie que le même résultat peut être obtenu sans que les Etats aient besoin de le négocier eux-mêmes car tous ces gens détestent l’intervention des Etats. Leur texte appelle à la mise en place d’une union budgétaire. Il déclare que  la discipline budgétaire est «  la base de la croissance durable ». Ah les bons élèves du libéralisme !  Ils appellent même les dirigeants de l'Europe à « mettre en œuvre des actions énergiques ». Ils demandent par ailleurs explicitement que le nouvel accord comporte « sous une forme juridiquement contraignante, un engagement des parties prenantes à prendre toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que, dans un délai maximal de cinq ans, l'accord sera intégré en substance dans les traités ». Autant de propositions que je dénonce. Mais il y a pire : nulle part, vous entendez, nulle part ils ne demandent qu’un tel traité soit soumis à la décision du peuple. Pas une fois les mots « consultation populaire » ou « référendum » n’apparaissent dans leur texte.

C’est tellement gros que même les socialistes français ont eu du mal à avaler. Mais leur courage et leur indignation n’a pas été plus loin qu’une molle abstention. Comme on le devine, avec mes camarades du Front de Gauche, Jacky Hénin, Marie-Christine Vergiat, Patrick Le Hyaric et Younous Omarjee, nous avons voté contre cette résolution. La droite a voté pour. La délégation socialiste française s’est, elle, contentée de s’abstenir. Quant à la délégation d’EELV, elle a réparti ses votes entre le pour et l’abstention. Honteux ! Vous pouvez retrouver la liste des votes sur le site du Parlement européen. Voici mon explication de vote : « Cette résolution commune de la droite, des sociaux-démocrates et des verts marque l'accord de ceux-ci avec le fond du traité en cours de négociation à savoir l'imposition d'une règle d'or renforcée. Cette règle astreint les Etats à avoir des budgets à l'équilibre ou en excédent et à tendre pour cela vers un chiffre de référence: 0,5% du PIB nominal de déficit structurel. Elle les oblige à graver de préférence ce diktat dans le marbre de leur constitution. Elle exige qu'ils mettent en place des mécanismes automatiques de "corrections" de leurs politiques budgétaires suivant les indications de la Commission. Loin de s'inquiéter de telles mesures, les quatre groupes signataires se bornent à réclamer leur participation au processus de création du nouveau traité et l'intégration sous cinq ans de celui-ci dans le droit communautaire. Ils ne réclament pas même le droit pour les peuples de se prononcer par référendum sur ce nouveau tour de vis austéritaire. Je vote contre. »

Un commentaire à “Retour sur la séance parlementaire de Janvier”
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  1. KALMAN Rudolf dit :

    Orbàn s'attaque à la banque centrale européenne? Orbàn est comparé à Chavez et à Castro? Peut être la gauche finira-t-elle par comprendre qu'Orbàn et à l'heure actuelle le seul des 27 chefs de gouvernement de l'Union Européenne qui ait le courage de s'attaquer au système financier multinational et aux politiques de récession que celui ci impose à l'Europe.


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